Apprentissage prénatal
Le méné à grosse tête n’éclot pas de l’oeuf avec une peur innée du brochet…
à moins qu’il n’ait été exposé, encore embryon, à l’odeur des restes de congénères jumelée à celle du prédateur. Si cette récente observation par des chercheurs de l’Université de la Saskatchewan n’est pas une première — le phénomène est documenté chez la grenouille des bois et la truite arc-en-ciel —, elle a ceci d’unique que jamais auparavant les biologistes n’avaient confirmé chez un poisson l’aptitude à reconnaître un nouveau prédateur et à réagir selon l’intensité de la menace à laquelle il a été soumis à l’état embryonnaire.
Afin de reproduire des indicateurs olfactifs de danger, les scientifiques ont d’abord préparé des solutions diluées de peau de ménés adultes et de brochets dans lesquelles ont été plongés, pendant quatre périodes d’une heure, des oeufs de ménés. Trois mois après l’éclosion, et ce, jusqu’à dix mois, les alevins ont été sporadiquement transférés dans des aquariums contenant différentes concentrations de ces signaux olfactifs. En mesurant le niveau d’activité des ménés, les chercheurs ont noté que tous réduisaient leurs mouvements en présence des odeurs, une défense efficace mais qui entrave partiellement la quête de nourriture. Ce n’est cependant qu’au plus fort degré d’odeur que les ménés, en dernier recours, se réfugiaient dans un abri et cessaient de se nourrir. L’apprentissage est à la base de ces comportements, mais l’équipe n’exclut pas la possibilité qu’interviennent des modifications génétiques développementales telle une élévation de certains récepteurs cellulaires.
Source : Animal Behaviour, juin 2021
Crédit photo: Wikimedia Commons