L’évolution ne craint pas l’eau froide

Une marche ou une plongée en région tropicale vous en convaincra rapidement: la variété des espèces est plus grande là-bas que dans nos régions boréales et polaires. Les hypothèses pour expliquer ce gradient latitudinal de biodiversité – reconnu depuis des siècles – sont nombreuses, la plus récente étant que la vitesse de spéciation est un processus contrôlé par l’énergie. Tout va plus vite quand il fait chaud : les réactions biochimiques, la possibilité de mutations, le taux de sélection. Or une équipe internationale de chercheurs remet en cause cette explication thermique.

Se basant sur une étude approfondie des « arbres généalogiques » d’au-delà de 30 000 espèces de poissons marins à nageoires rayonnées, Daniel Rabosky, de l’Université du Michigan, et ses collègues sont venus à la conclusion que depuis les dernières dizaines de millions d’années, les poissons d’eau froide ont évolué plus rapidement que les poissons d’eau chaude. Ces résultats s’ajoutent à ceux déjà obtenus pour certaines espèces de vertébrés terrestres des latitudes élevées. Il n’y aurait donc pas de lien entre l’énergie, le métabolisme et la spéciation. Il apparaît de plus en plus improbable que la vitesse de spéciation dans les grands espaces biogéographiques tels que le milieu marin soit la cause principale du gradient de diversité des espèces.

Source : Nature, juillet 2018      Crédit photo: Patrick Bourgeois