L’effet papillon
Le charbon de bois qu’ont laissé jadis les feux de forêt a longtemps été l’un des indicateurs privilégiés pour comprendre les perturbations naturelles de l’écologie forestière sur de longues périodes. Les incendies ne sont cependant pas les seules causes de bouleversements. Les épidémies d’insectes et leurs effets sur la forêt représentent également un élément fondamental du passé de ces écosystèmes. Toutefois, l’absence d’un indicateur efficace pour retrouver la trace de ces invasions anciennes a toujours rendu leur étude malaisée. Plus maintenant. En dénombrant les écailles de papillons fossiles recueillies dans les sédiments lacustres, des chercheurs de l’Université du Québec à Chicoutimi menés par Hubert Morin ont mis au point une nouvelle approche qui permet d’évaluer la fréquence et l’intensité de ces invasions. Lors d’épidémies majeures de la tordeuse des bourgeons de l’épinette (Choristoneura fumiferana), un nombre élevé de papillons issus des chenilles ravageuses tombent dans les lacs et se déposent sur les sédiments. Étant donné leur structure chitineuse, les écailles de papillons se préservent bien. En comptant les restes d’écailles de cette espèce tout au long d’une carotte sédimentaire s’étalant sur 10 000 ans, les chercheurs ont pu remonter le temps et détecter les grandes irruptions passées de cette tordeuse. En outre, comme il est possible de distinguer les écailles de diverses espèces, ils sont convaincus du potentiel et des multiples applications de ce nouveau paléoindicateur pour enfin relier les interactions entre le climat, le feu et les infestations d’insectes.
Source : Frontiers in Ecology and Evolution, janvier 2018
Crédit photo : Miguel Girona