Un trésor dans les nénuphars

Le retour de la belle saison fait annuellement la joie des odonatologistes, ces biologistes spécialisés dans l’étude des odonates, autrement dit, des libellules et des demoiselles. C’est le cas d’Alain Mochon, ce biologiste passionné qui observe, étudie et identifie depuis de nombreuses années ces insectes colorés qui animent nos milieux humides en été. C’est en 2012, au parc national du Mont-Saint-Bruno, qu’il avait fait une découverte digne de mention ; il y avait noté la présence de l’æschne des nénuphars (Rhionæschna mutata), une magnifique libellule remarquable à ses yeux et son faciès bleu ciel. À l’époque, cette observation avait défrayé la manchette dans le monde de l’entomologie, et avec raison : l’espèce n’avait alors jamais été répertoriée au Québec. Était-elle seulement de passage ? La petite population était-elle viable ? Il y a deux semaines, soit une décennie plus tard, Alain Mochon voulant trouver réponse à ces questions, est retourné au site de sa découverte. Eurêka ! L’espèce y évolue toujours. Des adultes ont pu être observés survolant le lac des Atocas, une petite tourbière de 6800 mètres carrés, au fond vaseux et aux pourtours forestiers. De surcroît, des exuvies (ou exosquelettes des naïades laissés sur place après l’émergence des adultes) ont aussi été observées, confirmant bien que l’espèce y boucle son cycle de vie. Toujours endémique à cette colline montérégienne, puisqu’étant encore aujourd’hui la seule population connue au Québec, voilà une autre preuve que nos milieux humides peuvent parfois abriter des espèces rarissimes.

Crédit photo : Alain Mochon