Oh! Oh!

5h30. Je trotte sur mon parcours habituel en ce petit matin déjà baigné par le soleil. Soudain, le long d’une basse haie qui me cachait d’abord la vue, je marmonne un oh! oh! inquiet: une touffe de poil noir rayée de deux raies blanches furète à la base d’une épinette. Je m’arrête, davantage surpris de cette rencontre inopinée que par l’idée d’admirer le notoire animal. À peine quelques mètres me séparent de la jolie mouffette; aucun doute, je suis dans la zone d’aspersion s’il lui prend l’envie de m’arroser. Elle ne dégage pourtant aucune odeur ce qui me suggère qu’elle n’a humecté personne récemment et est peut-être de tempérament pacifique. Par ailleurs, elle ne semble pas du tout se préoccuper de ma présence, plus affairée à gratter le sol que de m’inspecter. Moi, par contre, je l’observe, de plus en plus rassuré. Je vois ses yeux menus, d’ordinaire indistincts dans le pelage foncé, et ses minuscules dents blanches. Quelle mignonne face elle a! Jamais je n’ai observé cette bête d’aussi près. Après le salut d’usage, je poursuis ma route avec un large sourire. Merci madame mouffette!

Pierre Bonneau est rédacteur en chef au magazine Nature sauvage

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