Des coléoptères révèlent l’invisible
Dans notre magazine d’automne, nous vous parlions de vieilles forêts. Les vieilles forêts peuvent parfois être retrouvées en gros fragments dans les paysages de conservation, mais aussi en petits fragments, enchâssés au sein de paysages aménagés. Prenez un fragment de chacun de ces paysages et positionnez-vous en leurs centres respectifs. De mêmes tailles, de mêmes âges et composées sensiblement des mêmes essences d’arbres, vous y verrez, à l’œil nu, deux habitats tout à fait identiques… et pourtant! Telle une diseuse de bonne aventure pouvant révéler l’invisible, les biologistes qui utilisent les insectes comme « boule de cristal » sont en mesure de constater des différences. La présence ou l’absence de certaines espèces d’insectes, plus particulièrement chez les coléoptères, sauront dire si la forêt, en son pourtour, a été aménagée ou est demeurée intacte. C’est ce que révèlent les résultats de Louka Tousignant et Billie Chiasson ayant mené une étude sur ce type de territoires dans le nord-ouest du Nouveau-Brunswick. Sous l’égide de M. Gaétan Moreau, professeur titulaire au département des sciences biologiques de l’Université de Moncton, ces deux étudiantes ont voulu vérifier la composition de l’entomofaune au sein de vieilles forêts a priori similaires. Pour ce faire, elles ont capturé plus de 17000 coléoptères sur différentes parcelles. De cette récolte, 213 espèces réparties sur 42 familles furent identifiées. Parmi ce nombre, 46 espèces furent uniquement retrouvées dans les paysages de conservation et 47 dans les paysages aménagés. Outre cette différence, l’abondance des coléoptères était 2,7 fois plus élevée dans les paysages de conservation que dans les paysages aménagés. À titre d’exemples, deux espèces très abondantes, Glischrochilus sanguinolentus et Trypodendron lineatum, furent associées aux paysages de conservation. Ce résultat semble indiquer que les vieilles forêts, préservées intégralement sur de grandes étendues, possèdent des qualités uniques qui semblent essentielles pour nombre d’espèces saprophages, mycophages et xylophages.
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Crédit photo : Udo Schmidt / Wikimedia Commons